Le Comité des droits de l’enfant des Nations Unies remet les pendules à l’heure

La pénalisation de la mendicité : Le Comité des droits de l’enfant des Nations Unies remet les pendules à l’heure

La Présidente du Comité des droits de l’enfant des Nations Unies, Madame Kirsten Sandberg confirme que le Comité n’appelle pas à la pénalisation de la mendicité. Celui-ci rappelle que les parents ne doivent pas être emprisonnés pour avoir mendié avec leurs enfants mais que, par contre, toute loi ou toute décision individuelle affectant les enfants doit être prise en conformité avec l’intérêt supérieur des enfants et que chaque enfant a le droit de rester avec ses parents et de grandir dans un environnement familial et social propice à son développement. Les décisions qui concernent les enfants doivent toujours être prises sur base individuelle, en tenant compte de l’intérêt supérieur des enfants concernés.


Bruxelles, le 19 juin 2013

Depuis plusieurs semaines, la Commission de l’Intérieur du Sénat se penche sur la question de la mendicité accompagnée d’enfants. Une proposition de loi appelant à pénaliser la mendicité dès lors que ces enfants accompagnent la personne qui mendie est, comme on le sait, en discussion (proposition n° 5-1477/1 relative à l’exploitation de la mendicité).

Les signataires, personnes ou associations travaillant dans le domaine des droits de l’enfant sont particulièrement inquiets de la volonté de sanctionner très lourdement (de 1 à 5 ans de prison et de 3.000 à 300.000 euros d’amende) un comportement qui est avant tout dicté par un contexte de pauvreté et d’exclusion sociale résultant en partie de l’incapacité de notre pays d’offrir une protection sociale adéquate à ces enfants et familles.

Les signataires tiennent à réitérer leur opposition totale à cette approche pénalisante, qui n’offre aucune solution au problème auquel elle prétend répondre. Outre les conséquences sociales sur l’enfant et la famille qui ont déjà été largement dénoncées, les signataires constatent que l’Etat belge est prêt à dépenser des sommes considérables pour enfermer les mères en prison, dans des conditions que l’on sait indignes, et prendre en charge les enfants dans des institutions, mais refusent les aides sociales de base qui constitueraient une meilleure réponse à ce phénomène qui nous interpelle tous.

Les signataires sont aussi particulièrement inquiets de l’instrumentalisation des recommandations du Comité des droits de l’enfant vis-à-vis de la Belgique, selon laquelle le Comité aurait préconisé une réponse pénale provoquant la rupture des familles et des conséquences importantes sur la vie et le développement des enfants.

C’est pourquoi ils ont tenu à questionner le Comité sur l’interprétation de leur recommandation formulée en 2010 et sur l’adéquation du projet de loi par rapport à sa doctrine et sa jurisprudence.

La Présidente du Comité des droits de l’enfant, Madame Kirsten Sandberg, vient d’adresser la réponse du Comité à cette interpellation. Le Comité des droits de l’enfant confirme qu’il n’appelle pas à la pénalisation de la mendicité. Il rappelle qu’une interdiction ne signifie pas que les parents doivent être emprisonnés pour avoir mendié avec leurs enfants. Le Comité rappelle par contre que toute loi ou toute décision individuelle affectant les enfants doit être prise en conformité avec l’intérêt supérieur des enfants (art. 3 de la Convention relative aux droits de l’enfant, Observation générale nº 14 du Comité des droits de l’enfant).

Il mentionne également les recommandations de sa journée de débat général sur les enfants de parents incarcérés (2011) qui réaffirment que chaque enfant a le droit de rester avec ses parents et de grandir dans un environnement familial et social propice à son développement. Les décisions qui concernent les enfants doivent toujours être prises sur base individuelle, en tenant compte de leur intérêt supérieur.

Une telle mise au point du Comité est réellement exceptionnelle, à notre connaissance c’est même une première, nécessitée par l’urgence de réagir à la proposition de loi qui prétend se fonder sur ses observations.

Les signataires demandent donc avec insistance au Parlement de revoir le projet de loi à la lumière de cette information capitale. A défaut, il est d’ores et déjà acquis que le Comité critiquera la position de la Belgique lors de la présentation de son prochain rapport périodique qui aura lieu au plus tôt en 2017. En attendant, une telle loi aura provoqué des dégâts considérables que nous pouvons encore éviter en agissant maintenant.

Nous tenons à rappeler que la législation existante permet déjà de punir l’exploitation de la mendicité, la traite et le trafic. Il n’est dès lors pas nécessaire de modifier la loi.

Signataires :
Association Françoise Dolto
Association pour le droit des étrangers (ADDE)
ATD Quart Monde Belgique – België
Centre interdisciplinaire des droits de l’enfant (CIDE)
Centre de Médiation des Gens du Voyage et des Roms en Wallonie
Conseil de la Jeunesse Coordination des ONG pour les droits de l’enfant (CODE)
Défense des enfants – International (DEI-Belgique)
Délégué général aux droits de l’enfant
GARDANTO Vereniging van Nederlandstalige Voogden van Niet Begeleide Minderjarige
Vreemdelingen
Jacques Fierens, Professeur à l’UCL, UN, ULg
Jeunesse et Droit
Kinderrechtencoalitie
Kinderrechtencommissaris
Kinderrechtswinkel
Ligue des droits de l’Homme
Liga voor Mensenrechten
Plan Belgique – Belgie
Réseau Belge de Lutte contre la Pauvreté (BAPN)
Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté (RWLP)
Service droit des jeunes de Bruxelles
Thierry Moreau, Professeur à l’UCL
UNICEF Belgique / UNICEF België
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Contacts
Benoit Van Keirsbilck – DEI-Belgique : 02/203 79 08 of 0497/42 07 77
Gaëlle Buysschaert – UNICEF : 02/230 59 70 of 0478/77 37 65
Frédérique Van Houcke – CODE : 02/223 75 00 of 0473/71 01 40
Farah Laporte, Kinderrechtencoalitie Vlaanderen : 09/225 90 25 of 0495/78 97 28

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