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17 octobre 2022 – Journée Mondiale du refus de la misère : Prise de parole d’habitants du léger au Parlement de Wallonie

17 octobre 2022 rognee 1A l’occasion de la journée mondiale du refus de la misère, le CMGV a pris part au moment de témoignages et d’interpellations organisé par le Mouvement LST (Lutte Solidarité Travail) autour de la Dalle posée en l’honneur des victimes de la misère au sein du Parlement de Wallonie.

Ce sont ainsi deux habitants du léger qui ont pris la parole pour témoigner des obstacles rencontrés par le fait même de leur mode de vie ; ces obstacles impactant tous les aspects de leur citoyenneté et de leur quotidien.

Réagissant à cette interpellation: « Oh mais de toute façon vous n’êtes pas des gens comme nous, vous n’êtes pas des pareils à nous ! », ils se sont ainsi exprimés :

 Benoît

Je m’appelle Benoît. Je suis propriétaire d’un terrain situé le long d’un petit chemin de campagne. La rue dans laquelle j’habite est particulière parce qu’on y trouve des styles d’habitation vraiment différents, des constructions en durs mais surtout ce qu’on appelle maintenant des habitations légères. Moi je vis dans un chalet, Thomas qui est à côté de moi vit dans une petite caravane, d’autres dans des résidentielles. 

Lorsque j’ai intégré mon chalet, la commune m’a radié de mon ancienne adresse et a refusé de me domicilier dans mon chalet. C’est pourtant mon chez moi, mon lieu de vie. On m’a appris, plus tard, que les motifs de ce refus ne tenaient pas la route… A ce moment-là, je ne savais pas comment faire pour faire valoir mes droits, je n’avais pas les ressources pour réagir. Les choses se sont enchaînées et ce refus répété de domicile a sonné le début d’un grand décrochage, je suis sorti des radars durant plusieurs années. J’ai donné ainsi raison à ceux qui jugeait ma manière d’habiter marginale, j’étais devenu plus qu’à la marge, invisible.

Je suis revenu dans le monde grâce à des bénévoles et des associations, mais je ne suis toujours pas domicilié à l’adresse de mon chalet.

Ma situation c’est celle de tant d’autres qui doivent lutter chaque jour parce qu’habiter comme ils le font depuis des dizaines d’années, n’est politiquement et socialement pas accepté. Au refus de domiciliation, il faut ajouter des refus de délivrance de permis ou des refus de régularisation alors qu’ils sont sur leur terrain depuis des années. Tous ces refus, on s’y heurte de manière systématique.

Alors les habitants que nous sommes, vivent, habitent, mais avec la crainte de devoir un jour tout quitter, on vit toujours en gardant à l’esprit qu’on est dépendant de la tolérance et de la bonne volonté d’une autorité. 

Thomas

Je m’appelle Thomas, je vis aussi dans cette rue.

Cette rue, elle n’est pas parfaite, idéale mais ce que j’y ai vu, ce sont des liens de solidarité incroyables entre beaucoup de ces habitants. Les difficultés, ça peut rapprocher, ça peut générer une entraide sincère. Et c’est le cas dans notre rue.

 Ce que j’ai constaté aussi c’est que c’est ce mode d’habiter qui n’est généralement pas accepté. Là où des autorisations pour installer une caravane, un chalet sont refusées, ce sont des gîtes qui y sont ensuite construits. Ce sont donc des choix délibérés qui sont ainsi fait par les autorités. 

 Je vois aussi certains habitants se voir proposer une somme d’argent pour intégrer un logement social…ce qu’on leur dit c’est qu’ils pourront bénéficier d’un logement plus digne, plus décent. C’est quoi la dignité, la décence si elle n’est déterminée que par l’autorité ? Mon logement actuel est digne et décent pour moi.

 C’est quoi le véritable objectif, le véritable enjeu ? Reloger chaque famille, chaque habitant dans des logements sociaux individuels ? Et le réseau de solidarité qu’on a tissé, il devient quoi ? On tend à individualiser encore….. isoler toujours…Est-ce que c’est vers ça qu’on doit encore aller aujourd’hui ? Et puis on veut déloger des familles entières alors même qu’on nous annonce une crise du logement sans précédent? C’est quoi le sens de tout ça? 

Vous savez, on est des gens comme vous autres.

On torpille nos initiatives, on torpille nos projets individuels et solidaires qui nous permettent pourtant de maintenir un niveau de vie ou des conditions de vie acceptables. Pourquoi? parce qu’ils ne rentrent pas dans les clous? Et si vous décidiez de les soutenir ces projets, de soutenir et de nous aider à améliorer ce qui est? On pourrait donner le meilleur de nous. Des compétences, des savoirs on en a. Oui on est des gens “comme tout le monde”, on fait partie du monde.

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